mercredi 30 janvier 2013

Benoit Fleury : un remède à la maladie de la norme ?

Benoit Fleury : un remède à la maladie de la norme ?


On se souvient qu’il y a quelques jours la commission des lois du Sénat avait adopté la proposition de loi déposée par les sénateurs Jean-Pierre Sueur et Jacqueline Gourault dans le but de limiter les normes applicables aux collectivités.

Etape suivante, les sénateurs ont adopté le 28 janvier, à l’unanimité, en première lecture, cette proposition de loi.
Benoit-Fleury
Ce texte substitue à la Commission consultative d’évaluation des normes (CCEN) un Conseil national chargé du contrôle et de la régulation des normes applicables aux collectivités locales. Cette nouvelle instance sera placée aux côtés du Comité des finances locales et disposera d’une autonomie budgétaire. Sa composition sera en outre élargie. Des membres des administrations de l’Etat, des parlementaires et des élus locaux y seront ainsi représentés, dont 10 conseillers municipaux, élus par le collège des maires de France.
Côté compétences, l’instance exercera de nouvelles prérogatives. Le Conseil rendra au gouvernement un avis, publié au Journal Officiel, sur les projets et propositions de règlements, de lois et de textes communautaires, créant ou modifiant des normes applicables aux collectivités. En cas d’avis défavorable, le gouvernement devra représenter un projet modifié.
Afin d’agir sur le stock de normes, le Conseil pourra formuler des préconisations sur les textes réglementaires en application. Des recommandations pourront aussi être proposées afin de viser l’adaptabilité de certaines normes aux contextes locaux. Nouveauté non négligeable, cette nouvelle instance se prononcera sur les règlements relatifs aux équipements sportifs.

            Voir le texte de la petite loi.

mardi 29 janvier 2013

De la rigueur du règlement de consultation par Benoit Fleury

De la rigueur du règlement de consultation par Benoit Fleury


« La lettre tue, l’esprit vivifie » (2 Co, 3 : 7) ; voilà une parole de saint Paul que le juge des référés du tribunal administratif de Lyon n’a pas fait sienne. Saisi par un candidat dont l’offre avait été déclarée irrégulière, il a interprété strictement le règlement de consultation du marché (TA Lyon, ord. réf., 17 oct. 2012, n° 1206383, Sté Naoned Systèmes).

1 – Faits


Par un avis d’appel public à la concurrence en date du 15 juin 2012, la ville de Lyon a lancé une procédure d’appel d’offres ouverte pour l’attribution du marché de renouvellement du système d’information des archives municipales.
Le 25 septembre 2012, l’offre d’un candidat – la société SARL Naoned Systèmes – a été rejetée comme étant irrégulière. La commune considérait en effet que le bordereau des prix unitaires (BPU) remis à l’appui de l’offre était incomplet et par là même en contradiction avec le règlement de consultation.
Le cadre du BPU fourni dans le dossier de consultation précisait il est vrai très clairement que toutes les cellules de prix devaient être renseignées « quitte à mettre 0 euros avec un commentaire d’explication ». Or, le BPU inclus dans l’offre de la société Naoned Systèmes n’était renseigné, dans la section n° 4 « Prestation forfaitaire d’intégration de la solution complète », elle-même subdivisée en deux items « Forfait d’intégration de la solution complète (hors reprise des données) » et « Forfait de reprise complète des données », que sur le plan de la quantité, sans aucune indication de prix forfaitaire H.T. ou de total ni aucun commentaire.

2 – Argumentaire de la société requérante


Contestant son éviction, la société a saisi le juge du référé précontractuel d’une requête tendant à la suspension de la passation du marché à conclure entre la ville de Lyon et l’entreprise retenue et demandant d’enjoindre à la commune de reprendre la procédure au stade de l’étude des dossiers des candidatures et d’offres.
Deux arguments principaux soutenaient ces prétentions.
La société avançait d’une part que la ville de Lyon avait méconnu les dispositions de l’article 53 du code des marchés publics dans la mesure où les informations absentes du BPU se trouvaient dans d’autres documents soumis au pouvoir adjudicateur, en l’espèce le détail quantitatif estimatif (DQE) et l’acte d’engagement qui mentionnait le prix global.
Dès lors, elle estime que la commune disposait des éléments nécessaires pour procéder à l’analyse de son offre en dépit d’une erreur purement matérielle.
Elle considérait d’autre part que la commune avait violé les prescriptions de l’article 59 du code des marchés publics en ne l’invitant pas à régulariser son offre. S’agissant d’une erreur matérielle une telle demande ne heurte pas le principe de l’intangibilité de l’offre.

3 – Décision du TA


Benoit-FleuryAucune de ces motivations n’a séduit le juge des référés lyonnais. Commençons par la seconde. L’article 59 visé prévoit bien qu’en appel d’offre ouvert, « il ne peut y avoir de négociation avec les candidats. Il est seulement possible de demander aux candidats de préciser ou de compléter la teneur de leur offre ». Mais il ne s’agit là que d’une simple faculté offerte au pouvoir adjudicateur et non d’une obligation. « Le pouvoir adjudicateur, rappelle le magistrat, n’est jamais tenu de faire usage de cette possibilité lorsque lui sont remises des offres comportant des contradictions ou ambiguïtés ou des offres qui ne sont pas complètes ». Dès lors, la ville de Lyon n’a pas manqué à ces obligations de ce chef. Sur le premier point en revanche, il peut paraître incompréhensible, de prime abord, que la commune ne procède pas elle-même à la régularisation dans la mesure où elle dispose des éléments, alors qu’en l’espèce l’offre de la société Naoned Systèmes était financièrement plus intéressante que celle de sa concurrente. Le tribunal administratif demeure inflexible et livre une interprétation stricte des textes du code estimant que
« la circonstance que le devis quantitatif estimatif inclus dans l’offre ait, quant à lui, mentionné des prix forfaitaires correspondant à ces deux prestations [pour lesquelles le BPU n’indiquait aucun prix], n’imposait pas au pouvoir adjudicateur de reporter spontanément ces prix sur le BPU dès lors que si les mentions portées dans le cadre du DQE organisaient une possibilité de rectifier des erreurs ou des mauvais reports de prix affectant ce document, à partir des seuls prix de référence indiqués au BPU, aucune disposition ne prévoyait une possibilité de correction symétrique dans l’hypothèse inverse ; qu’il n’était pas davantage tenu de procéder à une telle rectification à partir du montant total de l’offre figurant dans le projet d’acte d’engagement, quand bien même correspondait-il au total mentionné dans le DQE ».
Une approche aussi ferme surprendra l’observateur attentif de l’achat public, d’autant que le tribunal administratif de Nice, dans une affaire similaire à propos d’un appel d’offres en vue de la passation d’un marché à bon de commande ayant pour objet la refonte de l’infrastructure de stockage informatique avait conclu à la solution inverse :
« considérant que si le pouvoir adjudicateur est tenu de rejeter une offre irrégulière, il lui appartient toutefois d’apprécier la régularité de cette offre sans se borner au constat de la seule absence d’un renseignement exigé par les documents de la consultation ; qu’ainsi, sous réserve de l’égalité entre les entreprises candidates, l’absence de renseignement d’un prix ferme et forfaitaire dans une ligne préremplie du bordereau des prix unitaires exigé par le pouvoir adjudicateur à l’appui des offres, ne justifie pas à elle seule l’élimination de cette offre comme irrégulière dès lors que ce renseignement, sans qu’il soit raisonnablement possible de se méprendre sur sa teneur, figure effectivement dans ledit document, mais sans avoir été reporté au sein de cette ligne préremplie, ainsi que dans les autres documents composant l’offre et notamment le devis estimatif uniforme exigé par le pouvoir adjudicateur pour comparer les offres » (TA Nice, ord. réf., 8 nov. 2010, n° 1004131, Sté APX).

Il y a fort à parier que ce pragmatisme l’emporterait devant la Haute juridiction.

vendredi 25 janvier 2013

Statut de l’élu local par Benoit Fleury

Statut de l’élu local par Benoit Fleury


La commission des lois du Sénat a adopté la proposition de loi sur le statut de l’élu préparée par Jean-Pierre Sueur et Jacqueline Gourault. Tout en élargissant l’accès aux garanties existantes, elle a créé de nouveaux droits, en particulier en matière de formation. La commission a aussi adopté la proposition de loi déposée par les mêmes sénateurs dans le but de limiter les normes applicables aux collectivités.
Poursuite du renforcement des garanties accordées aux élus locaux pour exercer leur mandat dans de bonnes conditions. Tel est l’esprit de la proposition de loi que Jean-Pierre Sueur et Jacqueline Gourault ont, à la demande du président du Sénat, déposée le 12 novembre dernier pour répondre aux attentes exprimées lors des états généraux de la démocratie territoriale organisés les 4 et 5 octobre 2012. Les avancées contenues dans les cinq articles initiaux de la proposition de loi concernent les indemnités de fonction des maires et délégués communautaires, le droit à la suspension du contrat de travail, l’allocation différentielle de fin de mandat, la validation des acquis de l’expérience, ou encore le droit à la formation.
Benoit-FleuryLa commission des lois de la Haute Assemblée a examiné le texte le 23 janvier. Tout en l’approuvant, elle l’a complété afin d’améliorer encore les droits accordés aux élus locaux. Elle a étendu le bénéfice des crédits d’heures aux élus des communes de moins de 3.500 habitants qui sont aujourd’hui les seuls à en être exclus. Elle a également élargi le bénéfice du congé électif accordé aux candidats aux fonctions d’élu local, en l’ouvrant aux salariés candidats dans les communes de 1.000 habitants au moins (alors que le seuil est actuellement situé à 3.500 habitants).

jeudi 24 janvier 2013

Benoit Fleury : Saisine de la justice par un habitant, au nom de la commune

Benoit Fleury : Saisine de la justice par un habitant, au nom de la commune


Q – Quand un habitant peut-il saisir la justice au nom de sa commune ?


Réponse du Ministère de l’intérieur publiée au JO Sénat du 10 janvier 2013, Q. n°3023, p.  88.


En vertu de l’article L.2132-5 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), « tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d’exercer, tant en demande qu’en défense, à ses frais et risques, avec l’autorisation du tribunal administratif, les actions qu’il croit appartenir à la commune et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d’exercer ».
L’exercice par un contribuable local d’une action en justice qu’il croit appartenir à la commune est conçu comme un dispositif exceptionnel qui suppose un refus, explicite ou implicite, du conseil municipal d’exercer une telle action.
Aussi, le refus du tribunal administratif d’accorder au contribuable local une autorisation d’exercer une telle action en justice est-il justifié, dès lors que la collectivité a exercé celle-ci sous la forme d’une plainte avec constitution de partie civile (CE, 26 juin 1992, n°137343). Toutefois, l’exercice formel d’une action en justice par la commune ne doit pas constituer une manœuvre en vue de mettre fin à toute possibilité d’action pour le contribuable local.
Benoit-FleuryIl en est ainsi lorsque le dépôt par une commune d’une plainte avec constitution de partie civile a pour objet de faire juger celle-ci irrecevable, l’avocat mandaté par la commune ayant reçu instruction du conseil municipal de démontrer l’absence de préjudice subi par la commune. Dans un tel cas de figure, l’action engagée par la commune vise un objectif contraire à celui poursuivi par le contribuable local consistant à faire reconnaître et réparer le préjudice financier subi par la commune.
Intérêts opposés - L’autorisation d’exercer l’action en justice doit ainsi être accordée au contribuable local dès lors qu’elle «n’est pas dépourvue de chance de succès et présente un intérêt suffisant pour la commune» (CE, 13 octobre 2003, n°253804).
Par ailleurs, l’article L.2122-26 du CGCT prévoit que « dans le cas où les intérêts du maire se trouvent en opposition avec ceux de la commune, le conseil municipal désigne un autre de ses membres pour représenter la commune, soit en justice, soit dans les contrats ».
Au regard des éléments précités, il apparaît que les dispositions du CGCT et leur interprétation jurisprudentielle permettent de garantir l’effectivité de la possibilité ouverte au contribuable local d’exercer une action en justice présentant un intérêt suffisant pour la commune, tout en limitant cette possibilité aux cas dans lesquels l’exercice d’une telle action s’avère justifié par l’absence de recherche par la commune de la réparation du préjudice en question.

mercredi 23 janvier 2013

Propagande électorale par Benoit Fleury

Propagande électorale


Q – En période électorale, le maire peut-il prohiber la propagande électorale par voie de hauts parleurs ?


Réponse du Ministère de l’Intérieur publiée au JO Sénat, Q. n° 2676, 10 janvier 2013, p. 87.


Non. En vertu des articles L.2212-1 et L.2212-2 du Code général des collectivités territoriales, le maire agissant en tant qu’autorité de police municipale peut prendre toute mesure ayant « pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ».
Benoit-Fleury
Ces mesures de police doivent être strictement nécessaires pour assurer l’ordre public local et excluent par conséquent toutes mesures d’interdictions générales et absolues (CE, 19 mai 1933, Benjamin, n°17413/17520).
En outre, le Conseil d’Etat considère que l’interdiction par le maire de la circulation de tout véhicule équipé de haut-parleurs ou de porte-voix diffusant des publicités, des propagandes ou tout message de quelque nature que ce soit constitue une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés de circulation et d’expression (CE, 11 juin 2012, n°360024).
Par ailleurs, le juge électoral admet la diffusion de messages par haut-parleurs dès lors qu’elle ne s’est pas poursuivie après la clôture de la campagne électorale et qu’il n’est pas établi qu’elle ait excédé les limites de la propagande électorale (CE, 13 mars 2012, n°353499 et Cons. const., 9 janvier 1998, décision n°97-2129/2136 AN Réunion 3e circ.).