Droit d'expression de l'opposition
Q – Le maire
peut-il s’opposer, en tant que directeur de la publication, à l’insertion de
propos de membres de l’opposition dans le bulletin municipal ?
Réponse du Ministère de l'intérieur publiée
au JO
Sénat, 25 avril 2013, page 1354
« L’article
L.2121-27-1 du Code général des collectivités territoriales impose
de réserver, dans les bulletins d’information générale diffusés par les
communes, un espace d’expression aux conseillers n’appartenant pas à la
majorité municipale. Ce droit d’expression sur les affaires communales doit
être exercé par leurs titulaires dans le respect des règles fixées par le Code
électoral et par la loi du 29 juillet 1881 relative à la liberté de la presse.
L’article 42 de la loi précitée définit le directeur de publication comme
auteur principal des crimes et délits commis par voie de presse. La responsabilité
du maire, en tant que directeur de la publication, doit être appréciée à l’aune
de la jurisprudence administrative, mais également de la jurisprudence
judiciaire.
Devoir de vérification et de surveillance - Le
juge judiciaire attribue au directeur de publication, dans le cadre de ses
fonctions, un devoir de vérification et de surveillance des propos insérés ou
diffusés dans un média (Cass. Crim.,
22 octobre 2002, n°01-86908 ; Cass. Crim.,
27 novembre 2001, n°01-81390 ; Cass. Crim.,
8 juillet 1986, n°85-94458).
Du point de vue judiciaire, tout en restant soumise au
contrôle du juge, une action préventive du maire, directeur de la publication,
par une demande de modification des propos litigieux ou un refus de les publier,
peut toujours être envisagée s’il estime que ces propos sont de nature à
constituer, notamment, une provocation aux crimes et délits, un délit contre la
chose publique ou des personnes tels que punis par les dispositions du chapitre
IV de la loi du 29 juillet 1881.
Sa responsabilité de directeur de publication, en tant
qu’auteur principal de crimes et délits commis par voie de presse (article 42
de la loi du 29 juillet 1881), peut être dégagée
si la publication de l’article en cause est liée au respect d’une obligation
légale (Cass. Crim.,
17 octobre 1995, n°93-85440); en l’espèce, il
s’agissait d’une annonce légale et non du droit d’expression de l’opposition.
Responsabilité engagée - Le juge administratif
rappelle ainsi dans une décision récente (CAA Nancy, 15
mars 2012, n°11NC01004) que: «le maire d’une
commune, dès lors qu’il assure les fonctions de directeur de la publication du
bulletin d’information municipal, est susceptible de voir sa responsabilité
pénale engagée à raison des textes publiés par les conseillers n’appartenant
pas à la majorité municipale; qu’à ce titre il doit être en mesure, sous le
contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de s’opposer à la publication d’un
texte qui serait de nature à engager sa responsabilité; que le maire d’une
commune diffusant un bulletin municipal est ainsi en droit de refuser de
publier un écrit qu’il estime, sous le contrôle du juge, diffamatoire,
injurieux ou discriminatoire ou portant atteinte à l’ordre public et aux bonnes
mœurs».
Dans la décision du 7
mai 2012, n°353536, le Conseil d’État juge
qu’une tribune publiée par une élue d’opposition, si elle peut constituer un
élément de propagande électorale, ne saurait être considérée comme un don de la
commune au sens de l’article L.52-8
du Code électoral. Il estime en effet que: «la
commune ne saurait contrôler le contenu des articles publiés dans ce cadre [le
bulletin d’information municipale], qui n’engagent que la responsabilité de
leurs auteurs.» La commune ne peut donc avoir effectué un don au profit de la
campagne électorale d’un élu d’opposition. Cette décision de la haute
juridiction administrative, dans un contentieux électoral, ne peut être
interprétée comme remettant en cause la possibilité pour le maire, en sa
qualité de directeur de publication au sens de la loi du 29 juillet 1881 sur la
liberté de la presse, de s’opposer à la parution de propos susceptibles
d’engager sa responsabilité pénale ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire